Un mois avant la sortie du premier numéro de The Fury, il est grand temps de faire le point sur la nouvelle direction que prend la série Hellboy ainsi que des nouveaux enjeux que doit gérer notre démon préféré.
P’tite piqure de rappel avant de commencer à parler de choses sérieuses : Qu’est-ce que The Storm ? The Storm (première partie du volume The Storm and The Fury) est le dernier chapitre de la trilogie débutée avec l’Appel des Ténèbres (Darkness Calls en véhau) et fait directement suite à La Grande Battue (The Wild Hunt). Quant à The Fury, cette future mini série sera synonyme de deux gros changements ; que ce soit dans la série Hellboy ou bien dans celle de son personnage principal. Gros point important à souligner, Duncan Fegredo laissera sa place de dessinateur sur Hellboy à Mike Mignola dès la fin de The Fury.
Soyons honnêtes, depuis le départ de Hellboy du B.P.R.D. survenu dans Le Ver Conquérant, Mike Mignola n’a eu de cesse de faire traîner sa série en longueur. Il aura fallu à l’auteur pas moins de cinq années pour amener son personnage fétiche en Afrique afin de lui faire traverser une sorte de voyage mystico-spirituel sur fond de folklore africain. Et même si le tout a, encore une fois, été fait avec beaucoup de classe, il faut bien se rendre à l’évidence, Le Troisième Souhait a plutôt eu l’effet d’une douche froide qu’autre chose. Pour les premiers pas de Hellboy en solo, les fans s’attendaient à autre chose que Hellboy se tapant un trip façon Enter The Void.
L’explication à cette lenteur excessive ? Durant ces cinq longues années, Mike Mignola n’a eu de cesse de multiplier les projets en tous genres. En plus de faire avancer l’histoire du spin off B.P.R.D. à deux cents à l’heure, l’auteur de Hellboy a créé et développé de nouvelles licences comme celles de Hellboy Animated, Lobster Johnson ou bien encore celle de Witchfinder. Tout ce travail et cette énergie créatrice déployée ont empêché Mignola de faire avancer sa série de façon convaincante, à tel point qu’un nouveau dessinateur a été débauché par Dark Horse afin de permettre à notre auteur de reprendre les choses en main et de faire évoluer son héros. Ce changement s’appelle Duncan Fegredo.
Depuis l’arrivée de Duncan Fegredo sur Hellboy, Mike Mignola, enfin libéré des contraintes causées par le dessin, n’a eu de cesse de faire avancer sa série à un rythme d’enfer, faisant ainsi passer son personnage d’un univers sombre et lovecraftien vers un monde celtique beaucoup féérique. Ce changement ou pari ultra casse gueule, appelez le comme vous voudrez, a été une bouffée d’oxygène ayant donné un sacré coup de fouet à l’aventure du démon cornu. Le résultat est tout simplement bluffant et les conséquences inattendues (Hellboy, roi d’Angleterre et descendant du Roi Arthur ? Oh my god !). Mais surtout, pour la première fois depuis la fin du Ver Conquérant, la série donne l’impression d’avancer dans une direction mûrement réfléchie.
Pour ce qui est de l’aspect purement graphique de ce changement, la souplesse du trait de Fegredo a su rompre avec l’aspect de plus en plus monolithique et iconique du héros que Mignola lui donnait, et lui a insufflé l’humanité qu’il manquait au personnage.
Un changement de dessinateur nécessaire pour un passage émotionnel intense ? La question fait mal mais a le mérite d’être posée.
Mignola l’avait annoncé plusieurs mois avant la sortie du premier numéro de The Storm, cette mini série marquera un tournant décisif dans la vie de Hellboy. The Storm s’étant terminé il y à peu et un mois à peine avant la sortie du premier numéro de The Fury, où en sommes-nous concrètement ? Il est temps de faire un petit état des lieux :
A mi-chemin de The Storm and The Fury, Hellboy doit choisir s’il veut ou non prendre le commandement de l’armée des hommes contre le peuple des fées. Ce choix lui a été imposé par un personnage des plus énigmatiques et ambigus, la Fée Morgane. Selon elle, notre héros doit s’emparer d’Excalibur, l’épée légendaire qui lui permettra de prendre le contrôle de l’armée des hommes et affronter la Reine de Sang. Seulement voilà, Hellboy n’est pas dupe et il sent que quelque chose sonne faux dans cette histoire aux enjeux bien trop gros et importants pour ses épaules. Il rejette alors Excalibur et par la même sa destinée, et tourne le dos à son armée, laissant Alice seule dans un pub, entourée d’une armée de morts-vivants figés dans l’attente d’une prise de décision de leur leader en proie au doute. Seulement voilà, la Reine de Sang n'attend pas notre héros pour montrer ses réelles motivations et alors que son armée attend ses ordres, celle-ci invoque l'Ogdru Jahad.
En parlant de Alice et de son baiser échanger avec Hellboy, je dois avouer que Mignola m'a un peu déçu sur ce coup. Alors que del'Toro affichait son désir de vouloir créer une vie amoureuse à Hellboy dans ses deux films, Mignola exprimait clairement son mécontentement et le fait que jamais il ne ferait ça dans la bédé. Et pam ! Voilà qu'il change de fusil d'épaule, nous la fait à l'envers, et profite de Fegredo et de son style si doux et fin pour officialiser une relation amoureuse entre Hellboy et une humaine. Malgré ce petit détail qu'on taira vite pour ne pas ternier l'image de mon Dieu, il faut bien avouer que cela marche parfaitement. On assiste à cette scène qui nous aurait outré il y à sept ou huit ans et pourtant on plonge dedans sans que cela nous choque plus que ça. Et pour ça, je pense avoir deux raisons.
Premièrement, tout bon fan de Hellboy qui se respecte à vu les adaptations de Guillermo del'Toro. Du coup, le lecteur a incontiament intégré cette probabilité de voir Hellboy en couple. En gros, del'Toro a préparé le terrain pour Mignola, ce dessinateur réac qui a été scandalisé en voyant son personnage faire les yeux doux à une fille sur un écran de cinéma. Deuxièmement, le fait que Hellboy officialise une relation amoureuse à ce moment de sa vie le rend encore plus vulnérable, plus humain. Ce début de relation est pour moi arrivé au meilleur moment de sa vie. En effet, malgré le fait que Hellboy ait voulu affronter sa destiné seul à la fin du Ver Conquérant, il est pour moi évident qu'il ne pouvait affronter tout ce qu'il se passe dans The Storm and The Fury seul. C'est trop pour un seul homme, et j'insiste sur le mot Homme.
Mais le plus gros morceau dans l'histoire de The Storm concerne la victoire de la Baba Yaga sur Hellboy. En échange d’un petit service, cette dernière ne demande qu’une seule chose à notre démon : une compensation à son œil perdu. Un souhait auquel Hellboy se plie en s’auto-mutilant. Et pour la première fois depuis le début de la série, Hellboy, avec la perte de cet œil, évolue physiquement avant, bien sûr, de subir une évolution encore aujourd’hui inconnue.
Hellboy borgne, au-delà de la simple portée iconique que cela représente, ça claque !
Pour conclure, Mike Mignola révèle dans The Storm le développement d’une intrigue de malade et mûrement réfléchie. Une intrigue épique qui, à n’en pas douter, en surprendra plus d’un et entraînera son héros vers des cimes rarement atteints par un personnage de bédé. C’est donc officiel, tout du moins pour moi, Hellboy est une série qui restera dans les mémoires bien des années après sa déchirante (?) conclusion.